COLLECTIF

PHOSPHORE


21h38. Le Jeranto apparaît au loin. C’est l’heure précise de l’arrivée du bateau. Un instant qui n’appartient qu’à l’univers de l’île. Il faut mesurer toute l’importance de ce moment pour les insulaires. Ce navire vétuste, rouillé, abîmé par le temps, apporte une richesse précieuse. Dans ces immenses cales, il transporte une cargaison qui permet aux hommes de vivre. Après l’attente et la tension, le soulagement de le voir apparaître. Car certains jours, la mer le retient. Mais ce soir, le Jeranto est là. Il arrive de Gioia Tauro en Calabre. Au crépuscule, les hommes du port se pressent, s’affairent. Il faut l’accueillir. Il appartient au quotidien de l’île, à l’image du facteur qui livre le courrier. Ce vaisseau, mal entretenu et vieillissant, s’épuise sur cette mer intérieure. De port en port, il dégaze, il consomme, il pollue. Le Jeranto, plein de contradictions, est pourtant indispensable à la vie sur l’île.